L'IA n'est pas nouvelle dans le milieu médical. De nombreuses entreprises et projets, alliant machine learning et santé, ont prospéré dans les dernières années (Milvue en France pour la radiologie, Owkin pour la découverte de médicaments, ou encore le médiatique projet PaLM-2 de Google pour n'en citer que quelques-uns).
Cependant, l'avènement de l'IA générative représente un potentiel de mutation nouveau. En révolutionnant le traitement des données, en particulier textuelles et visuelles, la genAI s'apprête à redéfinir les positionnements du personnel médical et du patient, tant dans les méthodes d’apprentissage, l’accès à l’information que dans les pratiques opérationnelles.
Parmi les nombreuses opportunités qu'offre l'IA générative dans le secteur de la santé, voici quelques projets qui nous semblent particulièrement pertinents.
Pour se tenir à jour, médecins et chercheurs sont confrontés à la lecture d’un volume important de publications, abordant une variété de sujets (règlementations, recherche scientifique…). Aujourd’hui, il est requis de lire intégralement ces rapports, alors que seule une fraction de ces informations est directement pertinente pour leurs besoins spécifiques. L'implémentation de systèmes ciblés, combinant prompt engineering et RAG avancé, permettraient de personnaliser cette veille, en pré-filtrant les contenus avec beaucoup plus de finesse, puis en extrayant et en synthétisant les éléments les plus pertinents.
Si les assistants experts type chatbot se multiplient, ils trouvent une pertinence particulière dans le secteur de la santé, dont la somme des connaissances dépasse de loin la limite des capacités humaines. Formés et spécialisés sur des bases de connaissance vérifiées, ces assistants pourraient fournir un support important à la mémoire des professionnels de santé, ou encore des outils d'apprentissage intéressants pour les étudiants.
De manière similaire, de tels assistants seraient très utiles pour les patients. Ils pourraient conseiller dans des situations peu graves, voire effectuer des diagnostics de premier niveau. Bien loin des chatbots par arborescence, les chatbots d'IA générative pourraient adopter une interaction plus dynamique et personnalisée avec le patient. En utilisant le langage naturel, l'IA serait capable de poser des questions directes au patient, facilitant ainsi une description plus précise et détaillée des symptômes. De tels systèmes pourraient être mis en œuvre sur des plateformes en ligne telles que Doctissimo. Poussés encore plus loin, ils pourraient assister les patients dans le suivi de leur traitement ou la prise de médicaments.
Les modèles de reconnaissance d'image pour la santé se sont fortement développés lors de la dernière décennie et ont obtenus d'excellents résultats. Toutefois, ils étaient jusqu'alors entrainés sur une tâche spécifique (Ex : reconnaissance de fracture...). Avec les Transformers et les capacités multimodales des LLMs, à l'instar notamment de la caractéristique « vision » de GPT-4, de nouvelles opportunités s'ouvrent. Beaucoup plus polyvalents, les systèmes de vision par ordinateur pourront s'étendre à des tâches beaucoup plus variées, combinant de multiples capacités actuelles.
Former les professionnels de santé à l'utilisation de l'IA générative sera crucial. Notre conviction est qu’il essentiel de maitriser la technique avant de se lancer dans un projet (savoir ce qui peut être fait avant de faire). Il sera tout aussi important de lancer des collaborations, et de mettre en contact des professionnels avec des experts d'IA générative : les meilleures idées naitront de la confrontation entre le corps médical et les ingénieurs.
La protection des données médicales sensibles est primordiale. Après une année de maturation, ces problématiques ont trouvé des premiers éléments de réponse concrets : l’arrivée de serveurs avec des garanties claires (Microsoft Azure) ou des modèles open-source (MistralAI, Llama…) permettent de mieux protéger les données des patients, en limitant l'exposition aux acteurs américains goulus. Combiner ces solutions pour mettre en place des outils sécurisés et sensibiliser le personnel sur ces enjeux sera important.
Dans le secteur médical plus que partout ailleurs, les hallucinations du modèle ne seront pas permises, dès lors qu'il s'agira de phases critiques. Une adoption progressive et prudente (contextes moins critiques) permettra de rassurer et d'établir une base solide pour des applications futures plus étendues et potentiellement plus autonomes.
Il est crucial de rappeler que l'IA Générative n'est pas une solution miracle. Si elle est très prometteuse, son intégration doit être méticuleusement planifiée et adaptée aux besoins spécifiques du terrain, avec une vigilance particulière compte tenu de la sensibilité du secteur médical.
Si vous souhaitez approfondir votre lecture avec des exemples concrets d'usage à l'hôpital, nous vous suggérons ce travail de recherche de Stanford, sur la pertinence des modèles GPT-3.5 et GPT-4 dans la réalité pour la médecine (Études de Stanford sur l'IA Générative en Médecine).